Aimer … Toujours et encore …
On peut concevoir l’amour comme un vague sentiment, presque tiède, que nous subissons plus que nous ne le choisissons ; un « truc » qui s’impose à nous si bien que l’on peut se lever un matin avec le sentiment de ne plus aimer. C’est le drame d’une jeunesse saoulée d’illusions que l’on abreuve sans cesse de soi-disant bons sentiments : la paix, la tolérance, l’amour, etc. Ces mots vides de sens pour une société qui oublie parfois ce que veut dire aimer.
Nous entendons de toute part des revendications à l’amour. C’est l’argument à la mode, l’argument passe-partout pour tout autoriser et tout promouvoir. Au nom de l’amour, que ne permet-on pas ! Mais la société nous propose un amour qui n’est pas de l’amour ! Aimer ne signifie-t-il pas se dépasser, se donner entièrement ? Non pas d’abord en gardant son petit confort, ses petites habitudes ou ses petites sécurités, etc. Pourrait-on se donner en se préservant ? Pourrait-on se donner en gardant sa liberté ? Là est le mensonge de ces idéologies qui nous guettent : il faudrait être libre, se garder, s’entretenir, se préserver …
Mais, ne sommes-nous pas capables de plus ? N’aspirons-nous pas à plus ? Nous n’avons pas d’autre exemple de l’amour que le Christ crucifié. Mère Térésa disait : « un amour, pour être vrai, doit faire mal » ! Notre don, notre amour sera ce qu’il nous coutera. Un amour qui ne coûte rien, ce n’est pas de l’amour. Nous pouvons choisir un amour raisonnable, calculé, encadré, posé. Il ne rend pas heureux !
Imitons le don de Dieu ; « agissons comme le Seigneur » dit Saint Paul : là sera notre amour, le prix de notre folie de croyant et de chrétien ! Dans la logique de l’amour du Christ, la première question à se poser n’est pas « qu’est-ce que je reçois ? » ; mais « qu’est-ce que j’abandonne par folie de l’amour de l’autre ? » Comme le Christ sur la croix, aimer signifie « donner sa vie » ; cela passe par donner sa propre chair. Cela se concrétise donc au service de sa famille, au service des autres, au service de la cité (il y en a tant besoin !) … Bref, dans la perte de son temps, dans la perte de sa liberté pour l’autre. Là on aime, parce que, là, on donne son corps.
N’est-ce pas une folie ? Eh oui, je le crois ! Mais le monde n’a jamais avancé avec des tièdes et des raisonnables ; mais avec les passionnés et les exaltés. Le don de soi a quelque chose d’irrationnel, mais tant mieux : ce n’est qu’à ce prix qu’on imite l’amour du Seigneur lui-même.
P. Cédric BURGUN